Sacrée meilleure humoriste au Burkina en 2013, Edoxi Gnoula nous transporte au cœur d’un maquis africain dont elle interprète avec talent tous tou·te·s les occupant·e·s.
Un one woman show captivant ! LEGS « suite »(donation, héritage en français ou jambes en anglais) est le récit d’une jeune femme qui s’interroge sur son statut
d’enfant “bâtarde”. Edoxi a été élevée par sa mère et n’a jamais été reconnue par son père, qui habitait pourtant dans le même quartier pauvre de Ouagadougou. Nulle complainte dans ce travail, c’est plutôt la rage qui cogne aux fenêtres. Au père qui abandonne ses enfants vient répondre le dictateur qui abandonne la nation, par un raccourci poétiqueet politique fulgurant.
Edoxi
Gnoula incarne une foule de philosophes de comptoir débattant sur les
figures qui ont façonné le Pays des Hommes Intègres, en particulier
Thomas Sankara, qui lutta pour développer son pays, combattre la
corruption, alphabétiser la nation. Avec un don inouï pour jongler avec
les accents, les postures, les regards, la comédienne passe d’un
personnage à l’autre en un simple déhanchement, une paire de lunettes,
un dos voûté, une intonation de voix. Les transformations sont à la fois
imperceptibles et hallucinantes... Avec LEGS (suite) , c’est
ni plus ni moins qu’un petit miracle qui se produit, celui de rendre
palpable une destinée vécue à des milliers de kilomètres de nous.
Catherine Makereel, LE SOIR
Edoxi
Gnoula, incroyable et instinctive artiste Burkinabè, découverte par
Isabelle Pousseur pour Songe d’une nuit d’été (Théâtre National, 2012),
comédienne hors pair aux allures androgynes, dans ce costume taillé pour
homme. Elle ne trahit que peu à peu sa féminité dans un monologue
goûtu, plein de verve, aux accents d’abord politiques pour des propos
sortis tout droit des brèves de comptoir. Endossant tour à tour le rôle
des différents protagonistes, Edoxi Gnoula défend Thomas Sankara (né en
1949, assassiné le 15 octobre 1987 à Ouagadougou), Che Guevara africain,
adulé par les uns, détesté par les autres, ou accuse son successeur,
Blaise Compaoré, d’être un dictateur. Puis se demande pourquoi on
dénonce les fonctionnaires qui viennent boire des bières dans le maquis.
Le tout ponctué d’attitudes, d’expressions et d’un jeu plus parlants
que les mots. Bien présente également, la sensorialité, l’invitation à
manger le foie, la tête de porc qui fume, les intestins à l’ail, à
baisser le son en arrière fond… Toute l’Afrique s’invite à travers elle.
Laurence Betels, LA LIBRE AFRIQUE