La question n’est pas tant de savoir s’il faut monter ou non des classiques. L’important, c’est d’être guidé·e par une nécessité. Mais il est indéniable qu’une histoire d’amour existe entre certains classiques et certains publics. Cette histoire d’amour est respectable. Et sans que je m’y attende, elle m’a bouleversé.
Ainsi s’exprime dans un entretien récent François Gremaud, créateur d’une trilogie dont Phèdre ! est le premier volet. Avec Giselle… et enfin Carmen, il explore la représentation de la femme parfois archétypale du théâtre, de la danse et de l’opéra-comique. Une théorie voudrait que l’origine du point d’exclamation vienne de l’exclamation de joie, io en latin, qui aurait été abrégée d’un i au-dessus d’un o. Ainsi, bien que la pièce de Racine soit une tragédie, il est dans Phèdre ! question de joie, cette « force majeure » dont « le privilège est de savoir triompher de la pire des peines » comme le résume le philosophe Clément Rosset. On rit donc beaucoup, mais on admire aussi… Car à l’époque de Racine,ce signe de ponctuation était appelé le point d’admiration. Le véritable sujet de la pièce serait l’admiration que son unique protagoniste, Romain l’orateur, voue à la tragédie de Racine. Et celui-ci, qu’en tant que public on ne peut qu’admirer pour son enthousiasme débordant et la prouesse d’endosser tous les rôles, partage les différentes facettes de la pièce avec nous : la langue unique et merveilleuse de Racine, la force des passions qu’il dépeint mieux que personne, les origines mythologiques des protagonistes, le contexte historique de la pièce…
Une réécriture charnelle et explosive d’un immense classique du théâtre, ce tube aussi délirant qu’instructif tourne depuis sa création en Suisse en 2018.