Impulsé par Fedasil, le 1er Festival Frontières verra le jour en décembre 2024, dans toute l’entité de Mouscron.
A cette occasion, le CCM organisera un ciné-soupe avec la diffusion du film Limbo réalisé par Ben Sharrock en 2020.
Sur une petite île de pêcheurs en Écosse, un groupe de demandeurs d’asile attend de connaitre son sort. Face à des habitants loufoques et des situations ubuesques, chacun s’accroche à la promesse d’une vie meilleure. Parmi eux se trouve Omar, un jeune musicien syrien, qui transporte où qu’il aille le oud légué par son grand-père.
Ben Sharrock multiplie les scènes, séquences et images étrangement drolatiques avec cette intelligence de toujours raconter quelque chose de pertinent à travers elles. Dans Limbo, l’absurde est une tonalité mais aussi un élément métaphorique, soulignant le non-sens de laisser ainsi ces réfugiés désœuvrés pendant des mois en attendant de statuer sur leur sort. Pourquoi ? Pourquoi autant de temps ? Soulignant aussi le décalage qui peut exister dans un choc des cultures renforcés par ces situations au fond absurdes (devoir partir contre son gré de chez soi).
Au milieu de paysages naturels absolument magnifiques, Limbo est le théâtre d’un drame humain observé avec une profonde humanité, avec justesse, délicatesse et empathie. La lenteur flegmatique du rythme (jamais ennuyeux) donne d’autant plus d’impact à cette sensation de quotidien mélancolique hors du temps, où l’attente est l’enjeu central de la destinée de ces âmes dont les vies sont momentanément en suspens. Petite pépite à la fois humble et riche, Limbo est une formidable réussite qui en dit bien plus avec ses silences et son apparente désinvolture que bien des drames démonstratifs et appuyés. Car malgré le sujet lourd, le misérabilisme n’est jamais convié à la fête organisée par Sharrock. Et il faut se rendre à l’évidence, son regard épris d’humour donne finalement bien plus d’humanité et de chair à ses personnages que la majorité des drames cherchant l’empathie à tout prix. A travers la trajectoire de ce syrien parti sans le vouloir et trimbalant avec lui son instrument de musique dont il ne peut plus jouer « car il ne sonne plus pareil depuis qu’il est loin de chez lui », le cinéaste montre le réel quotidien de ces migrants en attente, la manière dont leur identité s’efface doucement loin de chez eux, la complexité géopolitique d’une tragédie humaine, et la difficulté de vivre l’accueil en terre étrangère où l’on n’est pas vraiment désiré par les uns tandis que d’autres ont une bien une once de compassion mais qu’ils ne savent pas forcément traduire.
Le film a été primé dans plusieurs festivals.
Couverture et soupe fournies.
« Limbo mêle brillamment le cinéma social à la Loach et l’humour pince sans-rire poétique de Kaurismäki, avec des personnages qu’on pourrait croire échappés d’un film des Coen. Et c’est par ce cocktail aussi inattendu que détonnant que Sharrock fait entendre sa propre voix. Aussi à l’aise dans les rires que dans les larmes. Dans le réalisme que dans l’onirisme. » Première