Plongée dans une casserole d’eau, la grenouille cuit lentement,
bercée par la douce chaleur. Elle finit par s’endormir et meurt.
Or, immergée dans l’eau bouillante, elle aurait pris la fuite,
sauvant sa peau d’une mort certaine.
À l’aune de cette petite fable de la grenouille, qu’en est-il de l’homme ou d’une société ? Après une trilogie sur la mécanique du profit et une conférence décalée sur l’impuissance du politique face au secteur financier, Zoo Théâtre poursuit son travail d’écriture scénique et de conscientisation rafraîchissante.
Créé au Théâtre National en 2020, Points de rupture – et sa force de tir -, nous revient aujourd’hui dans un monde aux impasses de plus en plus criantes, l’écologique comme la sociale, explorant ces moments où un être humain rompt avec le système dans lequel il est inscrit, afin de tracer une autre ligne. Burn-out, révolte, crise, profond désaccord… Le spectacle interroge l’oppression qui précède, voire qui déclenche ces mutations. Et face aux dangers imminents, restons-nous immobiles, endormi∙e∙s dans l’eau chaude ? Ou cette immobilité est-elle un effet d’optique ?
Sans jamais donner de réponses toutes faites, à la manière d’un voyage à travers une question, Points de rupture articule textes fictifs, matériaux documentaires, improvisations d’acteur∙ice∙s et contrepoints vidéo. La fuite, le corps qui lâche ou le cri « ça suffit ! » font le vide et c’est dans l’espace de l’humour et de la fantaisie, que le spectacle pose les premières pierres d’un « autrement » possible… Ne sommes-nous pas en effet traversé∙e∙s de sursauts permanents où nous cherchons le moyen de sortir de nos casseroles ? Peut-être même que l’on se prépare au grand saut ?
Quand nous repoussons l’échéance, quelles limites s’atteignent, quels déclics surgissent, parfois in extremis, quel imaginaire grandit au fond de nos cervelles et nourrit la possibilité d’autres issues et d’autres écritures ?
Car enfin, nous ne sommes pas des grenouilles et d’autres fables sont possibles.