Le monde est une choucroute ; nous, même pas l’os du jambonneau !
Un chien cherche un maître d’adoption et jette son dévolu sur Roger, portier désabusé d’un grand hôtel et habitant solitaire d’une caravane. L’homme hurle, aboie et grogne face à l’animal qui ruse et louvoie derrière ses lunettes noires. En mode clownesque et en inversant les rôles, ça mord donc, pour mieux éveiller les consciences. Car tout passe au scanner : la pollution, la misère, la politique, les intellos, le service social, bref la vie !
Avec ce texte-phare de Jean-Marie Piemme, Vincent Goethals nous reconnecte avec humour et intensité à la charge critique de la parole sur une scène. Sans artifice et au service d’un texte central, le spectacle convie le spectateur au bord d’une autoroute, dans un espace réduit au strict nécessaire d’une vie en déroute. Et cette satire théâtrale sans pitié d’une réalité cruelle, voire intolérable, est confiée à deux artistes funambules et amoureux des mots : Thierry Hellin dans le rôle du bon gros cabot, et Vincent Ozanon, dans celui du grand escogriffe qui cache ses blessures. En se disputant ce beau morceau d’os, les deux comparses comptent bien nous mordiller, nous faire rire et nous émouvoir, forts de logorrhées typiques de la langue de Piemme et de joutes verbales pétries de bon sens populaire. Car attachement, il y aura, l’un pour l’autre, et de nous pour eux, malgré et au-delà de la férocité.