« Nommer, c’est dévoiler. Et dévoiler, c’est déjà agir ».
Simone de Beauvoir
Le jour où la narratrice sans nom, jeune dame de compagnie d’une rentière désagréable et tyrannique, rencontre Maxim de Winter, mystérieux veuf cinquantenaire et propriétaire d’un domaine mythique sur la côte anglaise, elle est loin d’imaginer la tournure romanesque que va prendre sa vie. Une idylle inattendue amorcée dans un hôtel quatre étoiles à Monaco prend des allures de conte de fées pour la jeune femme. Très vite, le conte se pare des couleurs de l’étrange plutôt que de rose bonbon, et nous embarque dans un univers néogothique peuplé de domestiques hagards, où le souvenir de la « première femme » reste plus que prégnant.
Fidèle à ses précédentes adaptations de grands classiques de la littérature, Jeanne Dandoy s’inspire du roman Rebecca de Daphné du Maurier et de la version cinématographique éponyme qu’Alfred Hitchcock en a tirée. Elle nous propose un prisme contemporain qui rompt avec le récit éculé de la « seconde femme » engluée dans la jalousie, la solitude et la fragilité économique. D’Alice aux pays des merveilles à Barbe-bleue, le spectacle brasse joyeusement nos références traditionnelles du merveilleux pour nous offrir un thriller pop décalé, où une Cendrillon un peu godiche reprendrait le contrôle de sa vie. Si amour, passion, meurtre sont bien sûr au rendez-vous, les victimes d’emprise et l’amitié féminine y sont mises à l’honneur, sans obligation de vertu morale, ni de convenance. Vénéneux et « bitter sweet » à souhait !