La photographie et le cinéma ont-ils modifiés la manière dont nous observons les animaux ?
La naissance de la photographie, dans la première moitié du XIXe siècle, mais aussi la révolution industrielle, le bouleversement des rapports de production, et enfin la transformation de l'animal à l'état de bête, voire de chose ou de produit de consommation sont des phénomènes concomitants.
Est-ce un hasard !? S'il y a là des liens, ils ne peuvent être que révélateurs…
Observons-nous encore les animaux? Le faisons nous différemment depuis l'invention de ces drôles de machines de vision qu'ont été la photographie? Nous avons depuis la nuit des temps vécu dans la compagnie des animaux: ils ont nourri nos rêves, peuplé nos légendes, donné sens à nos origines et à nos destinées. Ils témoignent à la fois d'une irréductible différence, d'une étrangeté qui n'a cessé de nous questionner et de nous fasciner — peut-être même sont-ils la trace de ce que nous croyons avoir perdu : paradis lointain, innocence première ou rapport fusionnel à la nature.
S'intéresser à la photographie de l'animal, ce n'est pas seulement observer comment nous nous les représentons, c'est aussi se demander comment ils nous regardent et ce qu'ils voient de nous; quels signes ils nous renvoient et nous adressent, avec leur part de lisible ou d'incompréhensible, de mystérieux ou de familier.
Si l'animal a depuis longtemps endossé de multiples fonctions (magiques, divinatoires, sacrificielles), la question de son statut, voire de ses droits, a depuis 150 ans connu de rapides et profonds bouleversements; elle a aussi accompagné, notamment à travers la photographie, un changement profond de son statut de témoin, de sa force évocatrice, de sa puissance symbolique.
Cette conférence en forme de bestiaire balaiera l'histoire de la photographie mais aussi tous ses champs et registres, de la photo animalière au militantisme écologique, de la science au divertissement, de l'invention des « primitifs » aux nouvelles tendances des réseaux sociaux…
Emmanuel d'Autreppe est professeur (Esthétique, Histoire de la photographie, Littérature et écriture) à l'École supérieure des arts Saint-Luc de Liège. Il est responsable des arts plastiques au centre culturel de Marchin, collaborateur aux éditions Yellow Now; il écrit régulièrement à propos de photographie et de cinéma et s'occupe, en outre, de L'image sans nom, « un lieu pour les livres et la photographie » (Place Vivegnis à Liège) aux côtés, notamment, d'Olivier Cornil.
