« Un opéra en robe d’ecclésiastique » : c’est en ces termes ironiques que le chef d’orchestre allemand Hans von Bülow qualifia le Requiem de Verdi. Mais nous ne saurions reprocher à l’auteur de La traviata d’y rechercher parfois l’effet dramatique : c’est au contraire ce qui fait toute la singularité de cette partition. Verdi sublime le texte profondément poétique de la messe des morts catholique, traduit ses cris éperdus comme son espérance lumineuse, passe d’un solo éploré à des tuttis fracassants. Mais, au-delà de son apparence théâtrale, ce monument traduit une expression très personnelle de la foi et plonge l’auditeur dans une confrontation intime avec la vie et la mort.
À la création du Requiem de Verdi, nombreux furent ceux qui en fustigèrent le caractère trop spectaculaire. Il est vrai que l’expression musicale de l’émotion de Verdi à la disparition de son ami Manzoni, qui représente le point de départ de la conception de cette œuvre, est influencée par la composition de ses opéras. La ferveur qui l’anime n’en est pas moins sincère, et l’on se réjouit que Verdi soit revenu sur sa première intention : « il y a tellement, tellement, tellement de messes de requiem ; je ne vois pas la nécessité d’en écrire une de plus. »