Après des films réalistes, voire naturalistes, en costume ou noirs très noirs, Rabah Ameur-Zaïmèche se lance dans un polar aux confins des cités HLM. À partir d’un fait divers réel, le braquage d’un prince saoudien sur la bretelle d’une autoroute en 2014, il élève la banalité du quotidien de quelques gars de banlieue qui galèrent entre potes vers le panache d’une conspiration majestueuse. Là, entre hold up, gang armé, mafieux puissants et vengeance, il documente les bars PMU ou les familles en galère. Tendu dans sa fiction autant qu’évadé des codes qu’elle lui impose, "Le Gang des Bois du Temple" s’achemine librement dans son genre, vibrant d’un lyrisme sec, troué d’instants suspendus à la beauté d’une voix ou la tendresse d’un geste. Ameur-Zaïmèche n’enferme jamais ce qu’il filme dans son genre mais multiplie les figures sans les assigner. Tout se tient au bord des possibles. Y compris le film lui même. De cet indéterminé fuse le romanesque par où son cinéma s’invente autant que les personnages dans ses films. Alors même qu’ils semblent voués à l’échec, certains rêves arrivent à percer les murs de l’écrasante réalité. Pour le meilleur ou pour le pire, pourvu qu’on ait l’ivresse.