Elle est l’alter ego de Coetzee, son épée et son bouclier : celle qui parle en son nom et supporte les critiques et la colère de ses lecteurs et des polémistes universitaires. Elle est celle qui se faufile dans son imagination et voyage entre les pages pour nous parler de philosophie, de l’environnement, de questions sociales et existentielles, et attire notre attention sur le sort des animaux, sur l’injustice sociale, l’exclusion des personnes âgées, des infirmes. Elizabeth Costello est libre. Elle est celle qui apparaît dans des textes qui ne lui ont jamais été destinés. Elle est comme un fantôme, un spectre. Peut-être est-elle un dibbouk ? – cet esprit de la mythologie juive qui habite le corps d’un individu auquel il reste attaché.
Personnage récurrent dans l’œuvre de Krzysztof Warlikowski, Elizabeth Costello serait-elle aussi son dibbouk ? Mais alors qu’elle semble le hanter presque aussi souvent qu’elle le fait pour l’écrivain qui l’a appelée à la vie, aucune pièce ne lui a jamais été destinée.
En lui consacrant un spectacle à part entière, le maître du théâtre polonais franchit l’étape logique d’un processus dont il n’avait peut-être pas anticipé l’ampleur lorsqu’il lui a octroyé une place au cœur de son immense œuvre théâtrale.